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Compte rendu de la session BWGSPR 2017
  • Christophe Laruelle

La session du BWGSPR a été l'occasion d'écouter comme chaque année trois brillants orateurs.

Le Professeur De Backer nous a exposé les dernières recommandations européennes de prévention cardiovasculaire.

Elles ont été publiées par les experts des task forces des Sociétés Européennes de Cardiologie (ESC) et d'Arthérosclérose (EAS).

Parmi la longue table des matières, le Professeur De Backer a souligné trois items.

Tout d'abord l'estimation du risque cardiovasculaire fait toujours appel aux tables de risque SCORE pour la Belgique. Les patients peuvent être classés en quatre groupes ayant un risque de 2, 5, 10 ou 15 % de cardiopathie fatale.

L'objectif-cible reste la valeur du LDL-cholestérol, l'utilisation du cholestérol total étant insuffisante.

Une liste d'autres facteurs modifiables permet de moduler la valeur finale du risque SCORE. Retenons entre autres le statut social, l'obésité, la sédentarité, le stress.

Le tableau SCORE ne doit pas être utilisé en prévention secondaire, chez les patients diabétiques et/ou souffrant de maladies rénales et les hypercholestérolémies familiales sont également hors contexte.

Il a ré-insisté sur l'importance de deux contrôles biologiques espacés de deux mois pour initier ou adapter le traitement, à l'exception des syndromes coronariens aigus qui imposent d'emblée un traitement intensif par statine.

Il a insisté sur l'importance des mesures hygiéno-diététiques.

Les stratégies d'intervention sont aussi rédigées en fonction du niveau de risque des patients.

En second lieu, il s'est attardé sur les stratégies thérapeutiques.

En fonction du niveau de risque, le LDL-cholestérol doit être inférieur à 70, 100 ou 115 mg/dl, ou tout au moins diminué de 50 % de sa valeur de départ.

Ni le HDL-cholestérol, ni les triglycérides ne sont des objectifs dans les recommandations, mais un HDL-cholestérol supérieur aux valeurs normales en fonction du sexe et des triglycérides inférieurs à 150 mg/dl sont associés à un moindre risque.

Les plus hautes doses recommandées doivent être prescrites, certainement dans le cadre des syndromes coronariens aigus, en respectant la tolérance des patients.

Les statines restent le traitement de première ligne, l'ézétimibe et les 'bile acid sequestrant' doivent être associés en seconde ligne.

Les inhibiteurs PCSK9 ne sont réservés que pour les patients à très haut risque, comme les patients souffrant d'hypercholestérolémie familiale.

Enfin, le Professeur De Backer a abordé quelques situations cliniques particulières.

Les syndromes coronariens aigus exigent des hautes doses de statines, en combinaison éventuelle avec l'Ezetrol® ou les inhibiteurs PCSK9.

Un prétraitement par statines devrait être prescrit chez les patients admis pour angioplastie coronaire élective ou syndrome coronarien non-STEMI.

Le suivi thérapeutique est également bien codifié: deux contrôles biologiques doivent précéder l'initiation du traitement, exception faite pour les syndromes coronariens aigus.

Un contrôle doit se faire après huit semaines, puis annuellement une fois les valeurs-cible atteintes. Le contrôle des enzymes hépatiques doit aussi s'effectuer après huit semaines.

Notre orateur a terminé en regrettant que l'INAMI ne suive toujours pas les recommandations des sociétés scientifiques.

Notre second orateur, le Docteur Raymond Kacenelenbogen, de l'hôpital Saint-Pierre de Bruxelles, nous a entretenu des bienfaits de l'activité physique sur la santé cardiovasculaire.

L'exercice physique est le facteur prédictif positif le plus important quant à la survenue des maladies cardiovasculaires, plus que l'abandon des habitudes tabagiques, dixit notre orateur.

La survie après un syndrome coronarien aigu est directement liée au niveau de l'activité physique dans l'étude Crusade (figure 1). Le niveau de cardio-fitness prédit la survie à long terme. L'impact de l'exercice se fait aussi sur les autres facteurs de risque, l'effet par cette voie est de 50 %.

Les autres mécanismes sont liés à un impact direct sur la fonction cardiaque, par augmentation des collatérales, le préconditionnement du myocarde via les canaux potassiques, le remodelage cardiaque positif par des mécanismes épigénétiques via le micro-ARN (figure 2).

Une régulation dynamique de la fonction cardiaque se caractérise par une diminution de l'apoptose, de la fibrose et des PNUTS (figure 3).

L'impact de l'exercice physique est également d'ordre général via les myokines, la vasodilatation et l'amélioration de la compliance des vaisseaux (figure 4a et 4b).

Notre troisième orateur, le Docteur Sophie Gevaerts, nous a présenté une revue complète de la littérature concernant la cardiologie chez la femme.

Elle a commencé par nous rappeler que les maladies cardiovasculaires restent la première cause de mortalité chez la femme, cf. la publication dans Circulation de début janvier.

Certaines spécificités se rencontrent chez la femme: les vaisseaux sont plus fins, 4 % des grossesses se compliquent de maladie cardiaque, le syndrome de Tako-Tsubo se rencontre presqu'exclusivement chez la femme, les dissections artérielles spontanées sont également typiquement féminines et enfin la toxicité cardiaque de certains traitements est plus importante chez la femme.

Concernant les facteurs de risque cardiovasculaire, l'impact du tabagisme (surtout en association avec la contraception orale) et du diabète de type 2 est plus important. L'hypertension artérielle est nettement plus fréquente que chez l'homme après la ménopause.

La sédentarité est trois fois plus fréquente. Des facteurs de risque spécifiques existent également, comme les maladies inflammatoires systémiques, la ménopause précoce, la radiothérapie thoracique, l'éclampsie et la pré-éclampsie.

Le traitement substitutif de la ménopause reste controversée après les études WHITrial (impact négatif) et DOPSTrial (impact positif).

La cardiopathie ischémique a un spectre plus large chez la femme que chez l'homme. L'âge et les facteurs de risque influencent la présentation clinique.

L'angor vasospastique ou microcirculatoire est fréquent chez la femme.

Le diagnostic de la cardiopathie ischémique est difficile. Le test d'effort a, une sensibilité et une spécificité, de respectivement 60 et 70 %; la scintigraphie de 85 et 70 %.

À la coronarographie les pathologies spastiques et microvasculaires rendent le diagnostic difficile et l'utilisation d'un test à l'acétylcholine pourrait s'avérer utile.

Lors de la survenue d'un syndrome coronarien aigu, la symptomatologie est souvent fruste, l'utilisation du dosage de la troponine est efficace et la présentation est souvent tardive.

La maladie coronaire est souvent diffuse, de mauvais pronostic et liée à des ruptures, des érosions, voire des dissections de plaques athéromateuses.

L'interprétation des coronarographies peut être difficile, l'utilisation de l'OCT ou de l'IVUS pourrait apporter un aide précieux.

Si une dissection spontanée est observée, d'autres pathologies doivent être recherchées, comme les connectivites, les maladies systémiques inflammatoires ou la dysplasie fibromusculaire.

Les complications des SCA sont plus fréquentes, la participation aux séances de revalidation est moins bonne et l'impact du stress ainsi que de la dépression est important.

L'insuffisance cardiaque a également ses spécificités chez la femme: la forme HFpEF est bien plus fréquente que chez l'homme, entre autre liée à la prévalence élevée de cardiomyopathie hypertrophique concentrique.

La cardiomyopathie du péri- et post-partum exige un traitement supportif et est liée à une toxicité directe de la prolactine et ses dérivés.

Le syndrome de Tako-Tsubo survient dans 96 % des cas chez les femmes.

Le stimulateur triple chambre est insuffisamment utilisé chez les femmes, alors qu'il semble plus utile que chez l'homme en présence d'un BBGC.

Enfin, dans le domaine de la rythmologie, l'espace QT est spontanément plus long chez la femme, l'utilisation de stimulateur défibrillateur est 2 à 3 fois utilisé chez les femmes, entre autres dans les grandes études randomisées.

Concernant la FA, elle est plus fréquente chez la femme, plus symptomatique et grevée d'un moins bon pronostic.

En conclusion, Sophie Gevaerts insiste sur l'importance de se concentrer sur la prévention, le traitement et la recherche dans les pathologies cardiovasculaires chez la femme.

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