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Évolutions les plus récentes dans la technologie du S-ICD
  • Liesbeth Timmers

Depuis la première implantation du défibrillateur (cardioverter) automatique implantable sous-cutané (S-ICD) en 2008, tant le dispositif lui-même que la technologie dont il dépend ont connu une évolution progressiste et innovante. L'implémentation de l'algorithme Smart Pass®, de l'AF-monitor®, du MRI Protection Mode® et de l'Automated Screening Tool® sera expliquée plus en détails dans cet article.

Introduction

Le défibrillateur automatique implantable (DAI) constitue la pierre angulaire du traitement et de la prévention de la mort subite cardiaque.1 En plus de la délivrance d'un choc électrique salvateur, le DAI conventionnel transveineux (DAI-TV), muni d'une électrode, peut également stimuler le coeur (pacing). La stimulation cardiaque peut s'avérer nécessaire pour le traitement d'une bradycardie sous-jacente, pour une stimulation cardiaque biventriculaire dans le cadre d'un traitement de resynchronisation ou pour une stimulation antitachycardique en cas de tachycardie ventriculaire monomorphe.

Malheureusement, le traitement au moyen d'un DAI-TV n'est pas dénué de risques. D'une part, il existe des complications à court terme, qui sont essentiellement liées à la procédure d'implantation elle-même, et d'autre part, on a également décrit des complications majeures à long terme.2 À cet égard, mentionnons tout particulièrement le risque de défaillance de l'électrode et le risque d'infections locales ou systémiques. Dans les deux cas, cela débouche sur une procédure d'extraction (lors de laquelle il faut) afin d'enlever l'entièreté du système.3

En 2008, on a implanté pour la première fois en Europe un S-ICD muni d'une électrode sous-cutanée. Le S-ICD est le résultat d'un dispositif ayant la même efficacité que le DAI-TV, tout en évitant les complications connues. Le S-ICD est un système entièrement sous-cutané dans lequel l'électrode parasternale gauche est reliée au défibrillateur. Celui-ci est placé en dessous de l'aisselle gauche, de préférence en position inter-musculaire entre le grand dentelé et le grand dorsal.4 L'avantage d'un tel système sous-cutané est l'absence de contact avec la circulation sanguine et le coeur. De ce fait, les risques tels que perforation, tamponnade et hémo- ou pneumothorax sont exclus. Si une infection peut toujours survenir, elle restera limitée à une infection locale sans atteinte systémique ni endocardite. Le registre Effortless confirme que le S-ICD constitue un traitement sûr et efficace.5

En Belgique, la première implantation a été réalisée en novembre 2013 et, depuis lors, plus de 260 patients ont déjà été traités au moyen d'un S-ICD. Ces dernières années, tant le dispositif lui-même que la technologie dont il dépend ont connu une évolution importante, que nous développeronsplus approfondie ici.

De la première à la deuxième, puis à la troisième génération de S-ICD

Les S-ICD de première génération (SQRX 1010®) et leurs électrodes sous-cutanées (Q-trak®) ont été développés par Cameron Health Inc. San Clemente, CA, États-Unis, sous le regard approbateur du Dr Bardy, l'inspirateur initial du système.

Entre-temps, Cameron Health Inc. a été reprise par Boston Scientific Inc. Marlborough, MA, États-Unis. Ceci a d'emblée mené aux premières modernisations du dispositif et, dès août 2015, la deuxième génération de S-ICD, de type Emblem®, a fait son apparition en Belgique. Le dispositif était de volume réduit, plus mince, et ses bords étaient plus arrondis, ce qui permettait une implantation plus aisée (de meilleurs résultats lors de l'implantation). Par ailleurs, des investissements au niveau de la technologie de la batterie ont permis un allongement de la durée de vie de celleci, de 5,1 ans à 7,3 ans. Enfin, dès ce moment, l'utilisation du télémonitoring est également devenue possible avec les S-ICD (Latitude® Boston Scientific).

Environ un an plus tard, la troisième génération de S-ICD a fait son apparition, avec le S-ICD Emblem MRI®. Les changements ne concernaient pas les dimensions du dispositif, mais bien la technologie. Un nouveau filtre digital, SMART Pass®, a été développé pour réduire le risque de chocs inappropriés. L'appareil dispose d'un moniteur de la fibrillation auriculaire (AF-monitor®) et est également compatible avec l'IRM. Ces nouvelles évolutions seront commentées séparément (figure 1).

Smart Pass®

Tant les DAI transveineux que sous-cutanés peuvent délivrer des chocs inappropriés.

Dans le registre Effortless, on a comptabilisé 8,1 % de thérapies inappropriées au cours de la première année chez les patients porteurs d'un S-ICD. La cause la plus fréquente (5,3 %) était une surdétection cardiaque due à une surdétection de l'onde T (TWOS = T-wave oversensing). Des chocs suite à des troubles du rythme auriculaires n'ont été identifiés que dans 1,5 % des cas.5 Par le passé, on avait déjà démontré que le S-ICD est au moins équivalent voir meilleur sur le plan de la discrimination entre les arythmies auriculaires et ventriculaires.6

En ce qui concerne la détection des troubles du rythme cardiaque, le S-ICD fonctionne quelque peu différemment du DAI-TV. Le S-ICD analyse le rythme cardiaque sur la base de la morphologie de l'électrocardiogramme de surface (ECG) et non sur la base de signaux intracardiaques. Sur ce plan, il est possible de sélectionner un des trois vecteurs de détection (vecteur primaire, secondaire et alternatif) (figure 2). Pour une détection optimale et une classification correcte des troubles du rythme ventriculaires, il est conseillé de programmer deux zones (la zone conditionnelle et la zone de FV), de sorte que l'algorithme discriminant INSIGHT® soit activé, et ce, pour chaque génération de S-ICD.

La nouvelle technologie qui a été développée, SMART Pass®, est un filtre digital 9Hz high-pass additionnel qui vise à éviter les chocs inappropriés consécutifs au TWOS. Theuns et al. ont effectué une analyse rétrospective des épisodes real life au départ du registre Effortless. SMART Pass® entraînait une diminution de 57 % des chocs injustifiés en général, et plus spécifiquement jusqu'à 71 % de diminution des chocs injustifiés dus à une surdétection (oversensing) de signaux cardiaques, sans que ceci n'engendre de diminution de la sensibilité pour la détection d'une tachycardie ou d'une fibrillation ventriculaires7 (figure 3a-figure 3b).

SMART Pass® est automatiquement actif dans les S-ICD de troisième génération, mais il peut également être activé de manière rétrograde avec les S-ICD de deuxième génération Emblem, via une mise à jour du logiciel.

AF-monitor®

La fibrillation auriculaire (FA) est associée à un risque accru de mortalité, d'insuffisance cardiaque, d'accidents vasculaires cérébraux (AVC) et à une altération de la qualité de vie. La FA touche jusqu'à 40 % des patients porteurs d'un DAI.8 L'AF-monitor® utilise la combinaison de deux algorithmes, en l'occurrence la 'ventricular scatter analysis' et la 'heart rate density analysis', à l'aide desquels le rythme cardiaque est classé comme un rythme sinusal normal ou une FA. Dans l'évaluation de Boersma et al., on rapporte une sensibilité de 94 % et une spécificité de 100 %.9

L'AF-monitor® permet au médecin traitant de détecter précocement des épisodes asymptomatiques de FA et d'instaurer un traitement adéquat visant à prévenir les AVC. L'appareil va donner une notification s'il détecte une FA pendant au moins 6 minutes cumulatives sur 1 journée. Ceci peut être exprimé en nombre de jours ou en pourcentage de FA au cours des 90 derniers jours.

L'appareil conserve l'ECG d'un épisode de FA par jour, avec un maximum de 7 ECG des épisodes les plus récents.10

MRI Protection Mode®

Lorsqu'un DAI est exposé à des champs magnétiques puissants, il existe un risque accru qu'il délivre des chocs inappropriés.

Le S-ICD de type Emblem® (et donc pas la première génération de S-ICD) dispose d'un MRI Protection Mode® grâce auquel le patient peut subir une IRM du corps entier (jusqu'à 1,5 Tesla). En activant cette fonction, la détection et le traitement des troubles du rythme sont déconnectés. Par après, ces fonctions peuvent être rétablies manuellement ou automatiquement, après l'expiration de la période de time-out qui est (programmée à 6 heures)programmable. Cette période de time-out est programmable jusqu'à 6, 9, 12 ou 24 heures. L'administration d'une thérapie de choc en urgence va également mettre fin au MRI Protection Mode®.

Signalons toutefois une perte de fonction permanente du signal d'avertissement auditif ou du beeper. Le beeper émet un signal auditif lorsque la batterie doit être remplacée, lorsque l'impédance de l'électrode est anormale, lorsqu'il y a des temps de charge allongés et en cas de problème d'intégrité du dispositif. C'est pourquoi il est recommandé que chaque patient porteur d'un S-ICD Emblem® soit également suivi via le système de télémonitoring (Latitude® Boston Scientific).

Automated Screening Tool: AST®

Si un patient est candidat pour un S-ICD, il doit tout d'abord subir un ECG de screening afin d'évaluer si les signaux ECG peuvent être détectés correctement par l'appareil. Jusqu'à récemment, ce screening devait être effectué manuellement, à l'aide d'une règle graduée standardisée (figure 4a). Le médecin place alors 3 électrodes sur le thorax et obtient ainsi un ECG dans lequel les vecteurs de sensing primaire, secondaire et alternatif sont en fait reproduits. Cet ECG de screening vise essentiellement à éviter une fausse détection d'ondes T et s'avère fructueux si au moins 1 dérivation satisfait au screening.11

Depuis le début de cette année, on dispose de l'AST® ou Automated Screening Tool, pour lequel le screening peut être totalement automatique, via un programme installé sur le programmateur de Boston Scientific (figure 4b). La sélection des vecteurs de sensing utilise le Vector Select algorithm® qui est identique au mécanisme de sensing du S-ICD. Ceci permet de pallier les insuffisances du screening manuel, telles que la subjectivité entre les opérateurs et la variabilité au niveau du processus de screening, et rend le processus moins fastidieux.

Coup d'oeil sur l'avenir

Ces dernières années, la technologie du S-ICD a bien évolué et, dans le futur, nous nous attendons à des développements encore plus innovants. Citons p. ex. le rapport prometteur de Tjong et al. au sujet du fonctionnement d'un pacemaker sans (fil)sonde combiné avec un S-ICD dans une étude animale expérimentale.12 Sur ce plan, il n'y avait pas d'interférence au niveau du sensing et du pacing (du )par rapport au rythme cardiaque intrinsèque, tant chez l'homme que chez l'animal. De plus amples études portant sur l'efficacité de la détection et du traitement des troubles du rythme ventriculaires chez l'homme sont en cours.

Conclusion

Entre-temps, dans les études comme en pratique quotidienne, le DAI sous-cutané a prouvé qu'il constitue une alternative sûre et efficace au DAI transveineux pour les patients n'ayant pas d'indication de stimulation cardiaque en raison d'une bradycardie, dans le cadre d'un traitement de resynchronisation ou pour une stimulation antitachycardique. Depuis la première implantation en 2008, tant le dispositif que la technologie dont il dépend ont connu un développement positif avec l'implémentation de l'algorithme Smart Pass®, de l'AF-monitor®, du MRI Protection Mode® et de l'AST (Automated Screening Tool®).

Références

  1. Priori, S., Blomström-Lundqvist, C., Mazzanti, A., Blom, N., Borggefe, M., Camm, J., et al. 2015 ESC guidelines for management of patients with ventricular arrhythmias and the prevention of sudden cardiac death. Eur Heart J, 2015, 36, 2793-2867.
  2. Timmers, L., Van Heuverswyn, F., De Wilde, H., Jordaens, L. Evaluating current implantable cardioverter defibrillator implantation procedures can common complications be minimised? Expert Rev Cardiovasc Ther, 2016, 14, 579-589.
  3. Baddour, L., Epstein, A., Erickson, C., Knight, B., Levison, M., Lockhart, P., et al. Update on cardiovascular implantable electronic device infections and their management: a scientific statement from the American Heart Association. Circulation, 2010, 121, 458-477.
  4. Bardy, G., Smith, W., Hood, M., Crozier, I., Melton, I., Jordaens, L., et al. An entirely subcutaneous only implantable cardioverter defibrillator. New Engl J Med, 2010, 363, 36-44.
  5. Burke, M., Gold, M., Knight, B., Barr, C., Theuns, D., Boersma, L., et al. Safety and Efficacy of the Totally Subcutaneous Implantable Defibrillator: 2-Year Results From a Pooled Analysis of the IDE Study and EFFORTLESS Registry. J Am Coll Cardiol, 2015, 28, 65 (16), 1605-1615.
  6. Gold, M., Theuns, D., Knight, B., Sturdivant, J., Sanghera, R., Ellenbogen, K., et al. Head-to-head comparison of arrhythmia discrimination performance of subcutaneous and transvenous ICD arrhythmia detection algorithms: the START study. J Cardiovasc Electrophysiol, 2012, 23, 359-366.
  7. Theuns, D., Burke, M., Allavatam, V., Jones, P., Gold, M. Evaluation of a High Pass Filter Designed to Reduce Oversensing in the S-ICD. HRS, 2016, AB05-01.
  8. Kramer, D., Kennedy, K., Noseworthy, P., Buxton, A., Josephson, M., Normand, S., et al. Characteristics and Outcomes of Patients Receiving New and Replacement Implantable Cardioverter-Defibrillators Results From the NCDR. Circ Cardiovasc Qual Outcomes, 2013, 6, 488-497.
  9. Boersma, L., Mahajan, D., Jones, P., Mittal, S. Performance of a Novel Atrial Fibrillation Detection Algorithm for Use in Patients with a Subcutaneous Implantable Cardioverter Defibrillator. HRS, 2016, AB05-02.
  10. User's manuel Emblem S-ICD, Emblem MRI S-ICD. Subcutaneous implantable cardioverter defibrillator Model A209, A219. Boston Scientific.
  11. Olde Nordkamp, L., Warnaars, J., Kooiman, K., de Groot, J., Rosenmöller, B., Wilde, A., et al. Which patients are not suitable for a subcutaneous ICD: incidence and predictors of failed QRS-T-wave morphology screening. J Cardiovasc Electrophysiol, 2014, 25, 494-499.
  12. Tjong, F., Brouwer, T., Smeding, L., Kooiman, K., de Groot, J., Ligon, D., et al. Combined leadless pacemaker and subcutaneous implantable defibrillator therapy: feasibility, safety, and performance. Europace, 2016, 18 (11), 1740-1747.

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