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Faire du vélo… à Bruxelles
  • Raymond Kacenelenbogen

Chacun peut constater, à Bruxelles e.a., l'augmentation importante du nombre de cyclistes. C'est certainement une bonne chose, quand l'aménagement de la voirie est correct… Le comptage des passages quotidiens se fait par des bornes grises « Bike for Brussels » situées au bord des pistes cyclables aménagées (figure 1).

Les données actualisées sont disponibles sur le site Internet https://johndoe.be/lab/bbc et montrent une augmentation importante entre 2019 et 2023 (figure 2).

En tant que cardiologues, nous ne pouvons que nous réjouir de cette situation et conseiller à nos patients de se lancer. Oui, mais…

  • Parmi nos patients qui ne sont pas des cyclistes confirmés, très peu sont prêts à rouler à vélo en ville : en effet, la majorité des rues ne sont pas aménagées de façon sûre, et les accidents sur ces « pistes » improvisées sont relativement fréquents, surtout pour des usagers « faibles », plus âgés, non entraînés et moins agiles. Ces accidents résultent de collisions avec des automobilistes (48 %) mais aussi de simples chutes, ou de chutes causées par des rails de tram ;
  • L'effet bénéfique de l'activité physique sur la mortalité cardiovasculaire est bien démontré en prévention secondaire, mais de façon encadrée (réadaptation cardiaque pluridisciplinaire). La mort subite lors de l'effort sportif est très médiatisée, p.ex. lorsqu'un joueur de football s'écroule en plein match, mais dans plus de neuf cas sur dix, elle survient dans l'anonymat et concerne des personnes plus âgées, non entraînées, qui décident de se mettre au sport intensif ;
  • Ce n'est pas seulement le temps passé au sport qui compte, mais surtout l'amélioration de la capacité physique (« fitness ») ;
  • Le travail physique lourd n'est pas protecteur, c'est surtout le sport de loisir qui a cette fonction ;
  • La dose recommandée est actuellement une heure par jour de marche (d'un bon pas), et le calcul tient compte de l'intensité (METS ×heures/semaine) ;
  • Le bénéfice est on ne peut plus important pour les patients sédentaires, mais à l'autre extrémité du spectre, les sportifs de très haut niveau ne voient pas leur espérance de vie prolongée par rapport aux sportifs « amateurs ». Une étude récente a même montré un score calcique coronaire plus élevé chez ces grands sportifs, sans augmentation de la mortalité. Probablement de la même façon que pour le traitement par statines, les plaques d'athérome sont stabilisées, aussi parce qu'elles sont plus denses et calcifiées, avec un risque moindre de fissure et de syndrome coronarien aigu ;
  • En matière de pollution, la ville n'est peut-être pas le meilleur endroit pour respirer à pleins poumons… D'un autre côté, augmenter les trajets à vélo, en diminuant de ce fait ceux en voiture, n'a certainement pas un impact négatif sur cette pollution et contribue à réduire notre empreinte carbone.

Enfin, et c'est un aspect au sujet duquel les données sont encore plus difficiles à recueillir, le stress est un facteur de risque important (apparemment, le troisième après le diabète et l'hypertension). La question se pose donc de savoir si le vélo en ville diminue le stress du cycliste ? Et qu'en est-il du stress des automobilistes (accidents à éviter, augmentation des embouteillages, modifications imprévisibles des rues en sens interdit, etc.).

Une étude prospective serait la bienvenue, et Bruxelles semble à cet égard un terrain expérimental tout trouvé…

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