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Congrès ESC 2017 sur l'insuffisance cardiaque: quelques faits saillants
  • Riet Dierckx

Session : How to tackle congestion (4 présentations)

Décongestion: what are the targets (N. Sato)

Le professeur Sato (Japon) souligne dans son exposé que la congestion ne se manifeste pas seulement sous la forme de congestion pulmonaire ou d'oedèmes, mais peut aussi se traduire par une détérioration des fonctions rénale et hépatique ('congestion clinique versus organique').

La congestion rénale est traitée en réduisant la pression veineuse centrale et/ou la pression intra-abdominale. Au Japon, c'est le tolvaptan qui est utilisé à cet effet, un antagoniste des récepteurs V2 de la vasopressine, plutôt que des diurétiques classiques; ce médicament permet en effet de combattre l'accumulation de liquide à la fois intracellulaire et extracellulaire, tandis que les diurétiques exercent surtout leur action dans le compartiment extracellulaire. Cette situation a cependant entraîné un certain nombre de commentaires dans le public, étant donné que le tolvaptan n'a jamais montré d'effets sur des critères d'évaluation 'durs'; selon les données scientifiques, il entraîne certes une perte de poids, mais n'agit pas sur les symptômes de dyspnée.

Traitements de décongestion (W. Mullens)

Le professeur Mullens souligne à plusieurs reprises au cours de sa présentation que des 'pressions de remplissage accrues' ne sont pas la même chose qu'une 'hypervolémie'. Pour étayer son affirmation, il s'appuie sur ses propres recherches démontrant qu'une augmentation du volume plasmatique ne se traduit pas nécessairement par une hausse des pressions de remplissage. Un constat entretemps également reconnu par la Société Européenne de Cardiologie. Dans les recommandations les plus récentes en matière de traitement de l'insuffisance cardiaque aiguë et chronique, il est souligné que le statut volémique du patient doit être évalué en vue de déterminer le traitement correct: des pressions de remplissage accrues en l'absence d'hypervolémie seront de préférence traitées par des vasodilatateurs (p. ex. du nitroprussiate), tandis que les diurétiques seront préférés pour le traitement de pressions de remplissage élevées avec hypervolémie.

En dépit de la controverse entourant l'utilité ou l'inutilité de la restriction de sel et de liquide, le Pr Mullens reste un ardent défenseur de la restriction de sel. L'absorption de sodium via le tractus gastro-intestinal est en effet de 100 %, ce qui conduit à une rétention hydrique. Les diurétiques induisent une diurèse hypotonique et sont donc insuffisants pour entraîner l'excrétion de l'excès de sodium. La décongestion se fera de préférence: 1) en limitant l'absorption de sel, 2) en poursuivant certains objectifs hémodynamiques, à savoir: PAM (pression artérielle moyenne) > 60-70 mmHg, PVC (pression veineuse centrale) < 9 mmHg et PIA (pression intra-abdominale) < 8 mmHg, et 3) en augmentant l'excrétion du sodium. Les diurétiques de l'anse et les diurétiques thiazidiques ne suffisent pas pour atteindre une décongestion adéquate. En cas d'insuffisance cardiaque, il est en effet question d'une réabsorption accrue du sodium au niveau du tubule proximal (80 à 90 %), alors que les diurétiques classiques interviennent davantage en distal et sont donc peu efficaces. L'acétazolamide (Diamox®) exerce son effet au niveau du tubule proximal et agit en synergie avec les autres diurétiques. Une étude randomisée serait nécessaire pour comparer un traitement par l'acétazolamide + diurétiques à un traitement par diurétiques seuls.

Enfin, le professeur Mullens a souligné l'importance des vasodilatateurs dans l'insuffisance cardiaque aiguë et de l'augmentation progressive du blocage neuro- hormonal, aussi bien pendant qu'après une hospitalisation pour insuffisance cardiaque.

La résistance aux diurétiques (K. Damman)

La résistance aux diurétiques est considérée comme un prédicteur de mauvais pronostic dans le traitement de l'insuffisance cardiaque. À l'heure actuelle, aucune définition universelle n'est disponible pour cette situation. Les critères préétablis incluent entre autres la persistance de symptômes et signes d'insuffisance cardiaque, le besoin d'une dose quotidienne de furosémide ≥ 80 mg, une fraction excrétée de sodium < 0,2 %, l'absence de perte de poids en dépit d'un traitement par des diurétiques intraveineux.

Environ 50 % des patients atteints d'insuffisance cardiaque aiguë décompensée ne présentent qu'une faible, voire aucune perte de poids malgré un traitement par diurétiques (cf. données de l'étude ADHERE). Plus encore: certains présentent une (légère) prise de poids. Étant donné la corrélation modérée entre le poids et la diurèse, on peut choisir de surveiller le débit urinaire et d'évoquer 'l'efficience des diurétiques' au lieu de parler de 'résistance'.

La physiopathologie de la résistance aux diurétiques est encore méconnue. Les facteurs qui jouent un rôle sont: une activation du système rénine-angiotensine- aldostérone (SRAA) par les diurétiques, une diminution de la filtration glomérulaire, un effet de tolérance appelé 'braking phenomenon' (diminution de l'effet des diurétiques à mesure que le traitement est répété), une hypoalbuminémie, une réabsorption tubulaire distale et une congestion veineuse rénale.

À ce jour, on ne connaît que trois prédicteurs cliniques de la résistance aux diurétiques: 1) diurèse limitée pendant la première tranche de 24 h d'hospitalisation, 2) hypochlorémie et 3) excrétion de sodium après une 1re dose de diurétique de l'anse. Le traitement de la résistance aux diurétiques comprend la conversion du traitement oral en traitement intraveineux, une posologie suffisamment élevée de diurétiques, l'association de thiazides, d'antagonistes du récepteur aux minéralocorticoïdes (MRA) et/ou d'acétazolamide, et une optimisation de la perfusion rénale.

Ultrafiltration: a bridge over troubled waters? (M. Costanzo)

L'ultrafiltration (UF) peut constituer une solution au problème évoqué de résistance aux diurétiques. Les avantages de l'UF par rapport aux diurétiques sont: pas d'activation neuro-hormonale directe, meilleur contrôle de la quantité de liquide éliminée (et à quelle vitesse), restauration possible de l'efficacité des diurétiques, et absence d'effet sur le taux plasmatique de potassium et de magnésium.

Deux études majeures ont été menées sur l'effet de l'UF dans le traitement de l'insuffisance cardiaque: CARRESS et AVOID-HF. L'étude CARRESS n'est pas parvenue à démontrer l'avantage de l'UF, mais selon le professeur Costanzo, c'est surtout lié au fait que la dose de diurétique avait été déterminée de manière flexible (selon la diurèse) dans le groupe sous médicaments, tandis que dans le groupe sous UF, le liquide intravasculaire était éliminé à une vitesse constante de 200 cc/ heure. Ceci a entraîné après 4 jours une perte de poids similaire dans les deux groupes, mais au prix d'une augmentation de la créatinine sérique dans le groupe UF. En outre il n'était pas autorisé de traiter les patients du groupe UF par des agents vasoactifs, tandis que les patients sous diurétiques pouvaient l'être (12 % ont reçu des agents inotropes!). Enfin, aucune information n'était disponible sur le degré d'atteinte rénale préexistante dans les deux groupes.

Il a ensuite été décidé de lancer l'étude AVOID-HF, qui portait aussi sur une comparaison entre l'UF et des diurétiques IV comme traitement de l'insuffisance cardiaque aiguë décompensée, mais cette fois il a été autorisé dans les deux groupes d'ajuster l'intensité du traitement en fonction des paramètres vitaux et de la fonction rénale. Cette étude a été malheureusement interrompue prématurément en raison de problèmes de recrutement: au bout de 2 ans, seuls 224 des 810 patients ciblés avaient été inclus. Le professeur Costanzo a cependant insisté pour que les données disponibles soient analysées, et bien que le critère de jugement principal (délai jusqu'au premier événement lié à l'insuffisance cardiaque) n'ait pas été significativement différent entre les deux groupes (ce qui a été imputé à une puissance statistique insuffisante), une nette tendance en faveur du groupe de l'UF a été observée (30 jours de délai jusqu'au premier événement dans le groupe des diurétiques contre 60 jours dans le groupe de l'UF).

Des études complémentaires sont donc certainement indiquées pour mieux clarifier les effets de l'UF et le rapport coût-efficacité du traitement.

Faits saillants

Dans cette session, il a notamment été question de l'étude CHART, dans laquelle l'administration intramyocardique de cellules souches chez des patients atteints de cardiomyopathie ischémique a entraîné un remodelage inverse [reverse remodelling] significatif après 52 semaines (diminution de - 17 ml du volume télédiastolique du ventricule gauche (VTDVG)).

Dans le registre RICA (n = 2 753), l'insuffisance cardiaque (IC) avec fraction d'éjection ventriculaire gauche intermédiaire (FEVG intermédiaire) a été comparée à l'IC avec FEVG préservée et l'IC avec FEVG réduite. Il a été constaté que, pour ce qui concerne les critères de jugement 'durs' (mortalité et hospitalisations dues à l'insuffisance cardiaque), ce groupe est fort proche du groupe avec FEVG préservée, et affiche un meilleur pronostic que le groupe avec FEVG réduite. Il est cependant étonnant de remarquer que, contrairement au groupe avec FEVG préservée, les patients du groupe FEVG intermédiaire semblent tirer un effet bénéfique du traitement par le candésartan. Une analyse post-hoc a en effet révélé que le candésartan a réduit de manière significative la mortalité cardiovasculaire et le délai avant 1re hospitalisation pour insuffisance cardiaque chez les patients montrant une FEVG réduite et une FEVG intermédiaire, mais pas chez les patients avec FEVG préservée. De plus, les résultats d'une méta-analyse des données individuelles de patients ont été présentés concernant les effets des bêtabloquants chez des patients avec FEVG réduite, au niveau du rythme sinusal versus fibrillation auriculaire. Sur la base des données obtenues chez plus de 17 000 patients, il a été conclu que les bêtabloquants réduisent significativement le risque de décès chez les patients avec FEVG réduite, indépendamment de la fréquence cardiaque initiale (baseline), mais uniquement lorsque le rythme sinusal est présent. L'avantage de ces médicaments sur le plan du pronostic est totalement perdu en cas de fibrillation auriculaire sous-jacente.

Il convient de suivre attentivement les résultats d'autres études, à savoir : IMPEDANCE-HF (traitement de l'insuffisance cardiaque d'après le suivi de l'impédance pulmonaire versus la norme de soins), RED-HART (blocage de l'interleukine-1 dans l'insuffisance cardiaque décompensée), CVD-REAL (réduction des événements d'insuffisance cardiaque chez les patients atteints de diabète de type 2 traités par inhibiteurs du SGLT2), LAP-HF (création de shunt interauriculaire chez des patients avec FEVG préservée dans le but de réduire la pression auriculaire gauche et dès lors aussi les symptômes) et AUGMENT-HF (injection intramyocardique d'hydrogel d'alginate de calcium permettant d'obtenir un remodelage inverse et un effet favorable sur les symptômes et la capacité d'effort).

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